Concert pour flute
Adolph von Menzel - 1850-52
NOTES ET PORTRAITS
LE COMTE D'ALBARET.
Un autre amateur forcené de musique, qui vivait à Paris à la même époque, était le comte d'Albaret. Non-seulement il s'empressait d'aller à tous les concerts; mais, quoique sa fortune ne fût pas très considérable, il avait une musique à lui, comme en ont les souverains. Il logeait et nourrissait dans sa maison huit ou dix musiciens auxquels il payait des appointemens, leur permettant en outre de prendre des écoliers dehors aux heures qu'il leur laissait libres. Ces artistes, comme on doit l'imaginer, étaient tous du second ordre. La chanteuse, par exemple, qui ne chantait que des airs italiens, avait une assez belle voix, mais ne pouvait passer pour une prima dona, et je me souviens qu'il m'avait donné pour maître de chant un homme dont le savoir était médiocre. Il en était de même de ses instrumentistes, pris isolément, sans en excepter son premier violon; et cependant, tous ces gens-là avaient une telle habitude de marcher ensemble, et faisaient un si grand nombre de répétions, qu'on n'entendait nulle part de la musique aussi bien exécutée que chez le comte d'Albaret. Aussi tous les amateurs se rendaient-ils avec empressement à ses concerts. Ils avaient lieu le dimanche matin: j'y suis allée plusieurs fois, et j'en suis toujours sortie charmée.
Extrait du livre :
Souvenirs de Madame Louise-Elisabeth Vigée Lebrun
Édition : Librairie de H. Fournier - Paris 1835