Crémone vers 1535 - Palerme 1625
Née à Crémone aux alentours de 1532, Sofonisba Anguissola est la première de sept enfants d'un noble italien nommé Amilcare Anguissola, sénateur de la ville et de Bianca Ponzone, également issue d’une famille noble. Comme ses sœurs elle bénéficie d'une excellente éducation et étudie le latin, la musique, la peinture. Ses sœurs, Elena, Europa, Lucia, Minerva et Anna-Maria, étudient également la peinture. Toutefois, Lucia est la seule à faire également de la peinture une profession. Elena entre dans les ordres dès son adolescence tandis que Anna-Maria et Europa renoncent aux pinceaux dès qu'elles se marient. Asdrubale, le fils cadet se consacre à la musique et au latin.
Bien qu'issue d'une famille noble, son père n'est pas peintre, elle ne peut donc, en tant que femme, s'initier comme les hommes puisqu'elle n'a pas le droit d'étudier l'anatomie et dessiner des personnages d'après nature. Quand Sofonisba a plus ou moins onze ans, son père la fait étudier, en même temps que sa sœur Elena, à l'atelier de Bernardino Campi, célèbre portraitiste et peintre de tableaux religieux. Elles suivent ses cours pendant trois ans. Puis Sofonisba et Elena entrent, en 1553, dans l’atelier du peintre Bernardino Gatti et deviennent ses élèves. Elles y restent trois autres années, tout en formant leurs jeunes sœurs.
Afin de promouvoir le talent de sa fille auprès d'une élite en dehors de Crémone, Amilcare envoie ses autoportraits au pape Julius III et à la cour d'Este à Ferrare. Le critique Giorgio Vasari et Michel-Ange apprécient les tableaux. Ce dernier admire spécialement sa façon de peindre une fille riante et la défie de peindre l'émotion opposée. Au lieu de choisir la classique vierge pleurante, Sofonisba choisit d'envoyer le Bambin mordu par une écrevisse, qui montre un petit garçon pleurant parce qu'il est mordu en plongeant sa main dans un plateau de fruits de mer tendu par une jeune fille souriante, ce qui plait beaucoup à Michel-Ange.
Grâce à des lettres écrites par le père de Sofonisba datées de 1557 et 1558, et conservées à la Bibliothèque Laurentienne de Florence, ou celui-ci remercie Michel-Ange pour sa courtoisie et son dévouement en initiant sa fille à la peinture, nous savons qu'elle à reçu des conseils du grand maître. Dans une autre lettre, il le remercie d'avoir été suffisamment gentil pour examiner, critiquer et priser les peintures de sa fille Sofonisba.
Sofonisba Anguissola se spécialise dans les portraits, mais il faut s'adresser à son père pour commander. Car conformément à la bienséance sociale de l'époque, elle ne reçoit personnellement aucune commande. La noblesse, à laquelle appartient l'artiste, ne peut sans déroger se livrer à une activité commerciale. Sofonisba ne travaille donc pas sur commission, avec contrat écrit prévoyant les prestations et le prix. La contrepartie de son travail lui est offerte sous forme de cadeaux en nature ou de rentes et avantages à la discrétion du commanditaire.
Toujours sous la protection de son père elle séjourne à Mantoue, Parme et Milan. Dans cette ville elle rencontre le duc d'Albe dont elle fait le portrait. C'est probablement lui qui suggère au roi d'Espagne Philippe II d'inviter Sofonisba à la cour. En 1559, elle quitte la Lombardie pour Madrid
Isabelle de Valois, épouse de Philippe II d'Espagne partage avec Sofonisba l'amour de l'art et de la musique et trouve en elle une confidente fidèle. Sa position à la cour était si importante qu'elle a pu y rester après la mort de la reine, alors que toutes les dames de compagnie devaient quitter le palais. C'est le roi lui-même qui s'est employé à trouver un époux à Sofonisba.
Sofonisba Anguissola est une des rares femmes de son temps à acquérir une réputation de dimension internationale en tant que peintre. Pourtant, la plupart des écrits de l'époque évoquent Sofonisba comme une dame de compagnie plutôt que comme peintre. En effet comme dame d'honneur de la reine elle occupe une position supérieure à celle qu'elle occuperait comme simple peintre de la cour.
A 39 ans elle contracte, après de longues négociations, un mariage de raison avec le sicilien Fabrizio Moncada. Mais le mariage et le séjour en Sicile qui s'en suit ne durent pas longtemps, car Fabrizio meurt précocement. Sofonisba décide alors de retourner vers sa ville natale. Sur la route du retour, elle s'arrête à Livourne, puis à Pise, où elle se marie soudainement avec Orazio Lomellini, capitaine d'une galère génoise, qu'elle a peut-être connu sur le bateau, suscitant ainsi la désapprobation de sa famille.
Elle s'établit à Gênes où elle poursuit avec succès sa carrière de peintre, même si elle doit faire face à quelques problèmes financiers.
Alors que des femmes telles que Lavinia Fontana, Barbara Longhi ou Fede Galizia étaient toutes filles de peintres, le cas de Sofonisba est probablement unique dans l'histoire de la peinture du XVIe siècle puisqu'elle n'est pas née dans une famille d'artistes. Comme toutes les femmes de son époque, elle ne peut s'initier comme les hommes puisqu'elles n'avaient pas le droit d'étudier l'anatomie et dessiner des nus masculins ou féminins. Elle ne peut peindre que des modèles particuliers ou faire son autoportrait pour ne pas risquer de subir les foudres des autorités ou de l'Église.